Rassemblement du 21 septembre 2013: Rassemblement contre la montée du militarisme au Canada

Invitation au rassemblement du 21 septembre 2013

  1. Artistes pour la Paix : discours de Pierre Jasmin, vice-président et discours de Guylaine Maroist, présidente
  2. Fédération des femmes du Québec: discours de Martine Éloy
  3. Collectif Échec à la guerre: discours de Raymond Legault

Discours de Pierre Jasmin, vice-président des Artistes pour la Paix :

En ce 21 septembre, les Artistes pour la Paix sont heureux de participer à ce rassemblement 2013 d’Échec à la guerre pour protester contre la montée du militarisme au Canada.

Cette montée s’est faite dans l’ombre, par exemple quand l’ancien recteur de l’UQAM Claude Corbo acceptait, sous la suggestion de Jean Charest, la présidente de la Financière Sun Life comme présidente du conseil d’administration de l’UQAM. Ô hasard, voilà que mes prises de position favorables à l’ONU seront refusées par la Chaire Raoul-Dandurand, commanditée par Power Corporation, alors que l’ONU à force de travail patient a forcé la Syrie à révéler ses caches d’armes chimiques, ce qu’Assad a fait hier. Pas seulement à l’université, la culture entière de notre pays vit des heures sombres avec les coupures conservatrices à toutes sortes d’organismes, tels l’Office National du Film et Radio-Canada. Aujourd’hui, laissez-moi vous présenter la nouvelle présidente des Artistes pour la Paix, Guylaine Maroist. À titre de documentariste qui vient de gagner dimanche dernier trois prix Gémeaux, elle est particulièrement sensible à ces coupures qui attaquent l’art documentaire. Deux prix sont allés à son film Gentilly or not to be qui remettait en cause les déchets nucléaires polluants et susceptibles de servir à la fabrication d’obus à uranium appauvri. Comme vous savez, la réfection de la centrale nucléaire était, malgré son coût sous-estimé de quatre milliards de $, encouragée par le premier ministre Jean Charest et par le président de la FTQ Michel Arsenault qui y voyait une belle occasion d’affaires en béton pour son ami Tony Accurso. On s’était zieutés, M. Arsenault et moi, à Bécancour lors de la confrontation de nos témoignages, le 13 avril 2011, devant la Commission canadienne de sûreté nucléaire. Ah, je m’ennuyais du sage Fernand Daoust, qui avait engagé la FTQ dans de belles manifs pour la paix!

Nos protestations négatives, même ludiques, avec les Carrés Rouges à qui nous avons remis un prix le 14 février dernier, ne suffiront pas pour contrer la militarisation du Canada. Je vous demande d’applaudir très fort Guylaine Maroist, qui représente la mobilisation de la jeunesse et qui a eu le courage de s’opposer par un travail acharné de cinq années à ces tout-puissants corrompus et qui a reçu des félicitations personnelles de la première ministre dimanche dernier.

Discours de Guylaine Maroist, présidente des Artistes pour la Paix :

Notre vice-président, qui est aussi membre des exécutifs de Pugwash Canada et du Réseau canadien pour l’abolition de l’arme nucléaire vient de publier sur le site web de la revue Affaires Universitaires un article détaillé sur le sujet. Vous y apprendrez peut-être que les compagnies Lockheed Martin et Northrop Grumman fabriquent aux États-Unis non seulement des bombes nucléaires, mais aussi les drones armés qui bombardent le Pakistan, le Soudan et le Yémen.Quel rapport avec nous, direz-vous? C’est là que cela devient intéressant. Lockheed Martin et Northrop Grumman fabriquent aussi les fameux F-35, ces avions furtifs et offensifs estimés à 45 milliards de $. Les Artistes pour la Paix ont réclamé la démission du ministre de la Défense Peter MacKay pour avoir osé envisager cette dépense de 45 mille millions de $, non pas pour la défense du pays mais à des fins d’éventuelles attaques.

Dans l’article de Pierre, vous verrez que ces deux compagnies américaines et General Dynamics jouissent du support financier de quelques institutions ou compagnies canadiennes comme Power Corporation, la Banque Royale, la Banque de Montréal, la Banque de la Nouvelle-Écosse et la Financière Sun Life se distingue en finançant et Lockeed et Grumman!

Il est temps de rappeler à ces institutions que la population refuse ces investissements dans la guerre, dans l’armement nucléaire que nous condamnons, de concert avec le secrétaire-général de l’ONU, jeudi prochain à New-York.

Call to action, artists for peace … Peace!

Discours de Martine Éloy, pour la Fédération des femmes du Québec

On s’entend que le militarisme et la guerre sont de très mauvais augure pour tous – hommes, femmes et enfants. Car il faut le dire – la guerre n’apporte pas la démocratie et bien-être mais plutôt destruction et carnage. Toutefois, les femmes sont frappées de manière particulière par la montée du militarisme et la guerre.

D’abord, rappelons-nous que l’armée est la plus importante institution patriarcale. Elle fait la promotion du culte et de la domination du chef, de la hiérarchisation du pouvoir, de l’obéissance aveugle et de la soumission…

La culture militaire amène une valorisation d’une masculinité stéréotypée, la promotion de l’utilisation de la force, la normalisation de la violence pour régler les conflits, la domination, la banalisation des violences envers les femmes. Cette culture de la violence, avalisée par l’État, se transmet à l’ensemble de la société.

Ici, cela se manifeste par la glorification de la guerre, telle la campagne du gouvernement fédérale pour le bicentenaire de la guerre de 1812, l’ouverture du Musée de la guerre à Ottawa, le recrutement dans les écoles, et même dans les écoles primaires ou les forces armées invitent les enfants à manipuler les armes pour vraiment avoir le feeling!

Dans les pays en guerre, la violence est omniprésente.

Le corps des femmes est toujours considéré comme butin de guerre et le viol est utilisé couramment pour humilier l’ennemi. On note une augmentation importante de la prostitution/travail du sexe dans l’entourage de bases ou de campements militaires lors des conflits armés.

À titre d’exemple, en Colombie, plus de 91 000 viols ont été enregistrés entre 2004-2009, dont 70% commis par la police et l’armée. L’impunité est flagrante — aucun cas de viol par les forces de l’ordre ne s’est traduit par une sentence de culpabilité!

De plus, le corps des femmes est considéré comme repos du guerrier. On note une augmentation importante de la prostitution/travail du sexe et de la traite dans les zones de guerre. D’après un article du journal The Independent, 50 000 irakiennes réfugiées auraient été forcées de se prostituer.

La guerre c’est aussi ça.

Les soldates ne sont pas à l’abri des agressions sexuelles, elles non plus. Selon une politicienne américaine, une soldate en Irak risquait davantage d’être violée par un collègue que d’être tuée par un tir ennemi. Là aussi, cette violence s’exerce dans une certaine culture de l’impunité et de banalisation par les responsables des forces armées alors que les accusés sont rarement traduits en justice. Des femmes soldates ayant été victimes d’agression sexuelle dans les forces armées se retrouvent aujourd’hui itinérantes aux États-Unis.

Mais en plus de la destruction et de la violence, le militarisme et la guerre entrainent aussi la détérioration des conditions de vie.

Dans les pays en guerre, des villages entiers sont détruits, les familles sont disloquées, imaginer perdre d’un coup père, mère, frères, sœurs, enfants… C’est cela la guerre.

Les aqueducs et les routes coupés, l’approvisionnement en eau et en nourriture devient sinon impossible, très difficile… des milliers de personnes se retrouvent déplacées et réfugiées… Or inutile de dire que ce n’est pas en situation de crise, alors que la seule préoccupation devient la survie, que l’amélioration de la situation des femmes est possible. La guerre entraine plutôt une importante dégradation de leurs conditions de travail.

La guerre c’est aussi ça.

Ici, au Canada, rappelons que le militarisme se caractérise entre autres par une augmentation vertigineuse des dépenses militaires. Des fonds publics sont dirigés vers la Défense nationale (l’armée, l’armement, le patriotisme militaire) plutôt que vers les services à la population (éducation, santé, logement, etc.).

C’est cela une politique militariste.

Saviez-vous qu’en 2005, le gouvernement canadien s’est engagé dans le plus importante augmentation du budget militaire depuis la 2ième guerre mondiale : soit 12,8 milliards $ sur 5 ans, auxquels se sont ajoutés 5,3 milliards $ alors que 10 milliards $ sur une période de 5 ans auraient suffit pour permettre à 800 000 enfants canadiens vivant sous le seuil de la pauvreté et leurs familles de sortir de la pauvreté.

C’est cela une politique militariste.

En 2010-2011, les dépenses militaires ont augmenté de 48% par rapport à 2005-2006 pour totaliser 23,7 milliards de dollars, Saviez-vous que cela représente 11 X plus que le budget alloué à la Société canadienne d’hypothèque et de logement (aide à l’habitation) qui est de 1.9 milliards $ ?

Vous vous rappeler surement de l’annonce de l’achat projeté des F-35. Savez-vous que l’argent nécessaire pour l’achat et l’entretien d’un seul F-35, soit 692 millions, suffirait pour financer

  •  86 000 nouvelles places en garderie
  • La construction de 34 hôpitaux en Afrique
  • La construction de 10 456 logements sociaux au Québec OU
  • Le salaire de près de 14 000 infirmières

C’est cela une politique militariste.

Le gouvernement Harper a aussi annoncé que le gouvernement allait investir 35 milliards de dollars dans la Marine. Or, avec seulement un dixième de ce montant, soit 3,4 milliards, nous pourrions acheter 8,500 autobus pour le transport en commun.

Entre 2007-2008 et 2027-2028, 490 milliards $ seront attribués aux dépenses militaires, soit environ 24,5 milliards $ par année.

C’est cela une politique militariste.

Discours de Raymond Legault, pour le Collectif Échec à la guerre

Bonjour !

Comme Martine l’a abondamment illustré, la montée du militarisme au Canada se traduit par une augmentation vertigineuse des dépenses militaires, représentant des pertes énormes en dépenses sociales dont l’ensemble des citoyennes et des citoyens pourraient bénéficier.

La montée du militarisme, c’est aussi le fait que la guerre est devenue un aspect central de la politique étrangère canadienne : sous de faux prétextes humanitaires – comme c’est généralement le cas, de toute façon – le Canada participe directement à des guerres d’agression : Afghanistan, Libye, bientôt en Syrie ? Et pour satisfaire à ces nouvelles orientations, le Canada s’est lancé dans la campagne de recrutement militaire les plus importante depuis des décennies, ouvertement axée sur le combat.

Un aspect particulier, mais fort significatif, de la montée du militarisme au Canada est son appui inconditionnel à Israël, un pays qui est en perpétuelle guerre d’occupation en Palestine et en violation de dizaines de résolutions de l’ONU; on parle ici d’appui politique mais aussi du développement de liens économiques (traité de libre-échange) et de liens militaires importants, notamment dans le domaine des drones : non seulement le Canada achète des drones israéliens, mais la compagnie montréalaise CAE est le fournisseur privilégié de matériel de simulation et d’entraînement pour les drones d’Aeronautics, une compagnie israélienne qui est le deuxième plus important fournisseur de drones au monde… Et CAE est un membre fondateur d’un Centre d’excellence sur les drones, installé à Alma depuis trois ans…

La montée du militarisme au Canada c’est aussi la présence envahissante de l’armée canadienne dans une multitude d’événements sportifs, sociaux, culturels : en particulier les matchs de hockey et de football, mais aussi les nombreux festivals – grands et petits – auxquels l’armée peut offrir des commandites alors qu’ils se sont souvent fait couper leur propres budgets. À titre d’exemples: les Fêtes du 400e à Québec, le Bal des Neiges à Ottawa, la Fête des neiges et le festival Présence autochtone à Montréal, etc.

Sans parler des nombreux événements spécifiquement organisés pour encenser l’armée :

  • le gala Fleurons glorieux (novembre 2011), à Montréal, pour saluer le retours des troupes canadiennes d’Afghanistan;
  • quelques semaines plus tard, à Ottawa, il y a eu une cérémonie officielle à grand déploiement pour le retour des troupes qui avaient participé aux bombardements contre la Libye (coût de la cérémonie : 800 000 $)
  • le Festival international des musiques militaires de Québec
  • le festival annuel Armée de culture dans le Vieux-Port de Montréal, depuis l’an dernier.

La montée du militarisme au Canada c’est aussi la mise en valeur de la dimension militaire dans tous les domaines : économie, histoire, recherche, immigration, culture, patrimoine, etc. À titre d’exemples :

  • Au congrès du Parti conservateur, en juin 2011, Stephen Harper décrit le Canada comme « Un pays fondé sur de grands principes ». Et les trois premiers mots qui suivent sont: « un guerrier courageux »;
  • les nombreuses et coûteuses activités de commémoration de la Guerre de 1812, présentée comme un moment fondateur du Canada (alors qu’il y avait eu des émeutes à Lachine contre la conscription dans cette guerre…);
  • Lors des cérémonies de citoyenneté, on souligne maintenant sur le rôle de l’armée canadienne et sa contribution importante pour préserver les valeurs de démocratie et de liberté; le guide officiel pour organiser ces cérémonies indique que cette intervention devrait être faite par un membre des Forces canadiennes
  • Dans le cadre du Plan d’action économique 2013 du gouvernement Harper, on lie clairement le développement économique et la production militaire. En mars 2013, la ministre Rona Ambrose a déclaré : « Notre gouvernement est déterminé à appuyer les Forces armées canadiennes, les travailleurs canadiens et l’économie de notre pays. Notre gouvernement continuera à tirer parti de l’approvisionnement militaire, en consultation avec l’industrie, afin de maximiser la création d’emplois, soutenir la capacité en matière de fabrication et d’innovation au pays et stimuler la croissance économique canadienne. »

Le Collectif Échec à la guerre publiera bientôt un fascicule sur ce vaste sujet de la montée du militarisme au Canada.

Dans la conjoncture actuelle, il est important d’aborder aussi la situation de la Syrie, la position canadienne sur cette question étant en lien direct avec le phénomène général dont nous venons de parler.

Dans un récent communiqué, le Collectif évoquait la situation épouvantable en Syrie et le risque réel d’embrasement régional, voire même mondial, advenant que les puissances occidentales se lancent dans leurs bombardements annoncés. Nous dénoncions ces bombardements tout comme le recours aux armes chimiques par quiconque, bien évidemment.

Suite à l’entente récente entre les États-Unis et la Russie concernant la neutralisation éventuelle de l’arsenal chimique syrien et à l’accalmie temporaire qui en est résulté, que pouvons-nous dire de la situation actuelle ?

  • malgré l’accalmie actuelle, la décision de certaines puissances occidentales de s’impliquer directement a bel et bien été prise; nous en sommes maintenant à la fabrication d’un prétexte et du discours officiel pour tenter de justifier ces bombardements :
    • on parle de « frappes ciblées », sans intervention terrestre, comme pour minimiser la gravité de ce qui se prépare. Il faudrait rappeler à la Maison blanche et aux grands médias qui en véhicule la propagande que l’attaque du Japon contre Pearl Harbour correspondait justement à ces critères…
    • on dit qu’on ne vise pas un « changement de régime ». C’est précisément ce qui avait été affirmé au début de la campagne de bombardements contre la  Libye…
    • comme George W. Bush l’avait fait pour l’Irak, on présente maintenant la Syrie comme une terrible menace à la sécurité mondiale. En effet, Obama a récemment déclaré que si l’accord russo-étasunien était bien appliqué, on mettrait ainsi fin à la menace d’armes chimiques, « non seulement pour les Syriens, mais pour le monde entier »!…
    • l’accord russo-étasunien ne change pas la volonté des États-Unis, de la France, du Royaume-Uni de bombarder la Syrie; leur insistance à placer une résolution du Conseil de sécurité sous le chapitre 7 de la Charte des Nations Unies, qui leur permettrait ensuite d’invoquer cela pour justifier leur agression, est claire à ce sujet;
    • les inspections seront-elles-mêmes un terrain de propagande et de manœuvres;
    • du côté occidental, comme pour l’Irak, on vise en somme à désarmer la Syrie avant un éventuel assaut final…
    • le Canada a un double discours qui ne devrait pas nous duper : d’un côté, il dit que la seule solution est politique… Mais il appuie à l’avance les bombardements occidentaux – qu’ils reçoivent ou non l’aval des Nations Unies. Il pourrait même y participer; son annonce actuelle, à l’effet du contraire, pourrait n’être qu’une position de négociation sur d’autres enjeux extrêmement importants pour le gouvernement Harper : le pipeline Keystone XL…

En terminant, mentionnons les actions à venir, organisées par le Collectif Échec à la guerre.

D’une part, la CAMPAGNE DU COQUELICOT BLANC, que nous lançons aujourd’hui pour la troisième année consécutive et dont les objectifs demeurent (1) de commémorer toutes les victimes de la guerre, très majoritairement civiles; et (2) de nous engager dans cette commémoration sur la base de notre opposition à la guerre et au militarisme. Nous vous invitons, à nouveau, à faire rayonner cette campagne dans votre entourage. D’autre part, dans le cadre de cette campagne, nous organiserons, cette année encore, une activité autour du 11 novembre prochain pour contrer l’esprit militariste des cérémonies officielles du Jour du Souvenir.

Solidairement, contre la guerre et le militarisme !